5ème Forum international de Dakar : Macky Sall dénonce les « forces du mal » à l'oeuvre en Afrique

5ème Forum international de Dakar : Macky Sall dénonce les « forces du mal » à l'oeuvre en Afrique

Le président sénégalais Macky Sall avec la ministre française des Armées, Mme Florence Parly (Photo @ Dicod)


A l'occasion du Forum de Dakar, consacré cette année aux « Enjeux de stabilité et de développement durables », le président sénégalais s'en est pris à tous ceux qui déstabilisent l'Afrique. Reportage.

Dakar, de notre envoyé spécial Bruno Fanucchi

Comme s'il était déjà en campagne électorale pour sa réélection à l'occasion de la présidentielle prévue en février prochain, Macky Sall ne perd pas une occasion de marquer son territoire et de hausser le ton sur la scène internationale pour mieux faire comprendre à ses compatriotes comme aux amis du Sénégal qu'il est devenu un personnage incontournable pour la sécurité de toute la sous-région et qui pèse bien au-delà de l'Afrique de l'Ouest.

C'est une évidence, bien sûr, de rappeler que « tous nos Etats sont menacés et exposés » au terrorisme car « aucun pays n'est à l'abri et chaque pays est une cible potentielle », puisque « les menaces, directes ou indirectes, transcendent les frontières ». Mais encore faut-il trouver les mots justes et forts pour que ce message porte. C'est-à-dire qu'il soit entendu et compris pour déclencher une véritable prise de conscience en Afrique. Et que les mesures idoines qui s'avèrent urgentes et nécessaires soient prises et permettent aux Africains de prendre en main leur destin, tant il est vrai que « la paix, la sécurité et la stabilité sont les préalables au développement ».

Organisée conjointement par la France et le Sénégal, la 5ème édition du Forum international de Dakar sur la Paix et la Sécurité en Afrique, qui s'est ouverte lundi au Centre international de Conférences Abdou Diouf (CICAD) de Diamniadio, était donc le lieu prédestiné pour permettre au président Macky Sall de se faire entendre devant un très beau parterre de plus de 500 décideurs, ministres, diplomates, généraux, industriels, experts et journalistes qui ont tous au cœur la passion de l'Afrique avec deux priorités en tête intimement liées : la sécurité et le développement.

« L'objectif de ce Forum,

c'est de lever les tabous »

« Il faut que nos Etats restent forts et résilients », a ainsi martelé le président du Sénégal lors de la séance d'ouverture après avoir rendu hommage aux deux organisations qui sont les chevilles ouvrières de ce rendez-vous désormais « incontournable » du Forum de Dakar : la Compagnie européenne d'intelligence stratégique (CEIS) que préside l'ancien député français Oliver Darrason, et le Centre des Hautes Etudes de Défense et de Sécurité (CHEDS), que dirige le général sénégalais Paul Ndiaye.

« Quand l'Etat est affaibli, il perd sa fonction protectrice, la confiance de ses populations et celle de ses partenaires », observe ainsi Macky Sall en ajoutant : « Les forces du mal qui attentent à la vie prospèrent où l'Etat est affaibli et défaillant. Or le premier droit fondamental de l'homme, c'est le droit à la vie ». On l'aura bien compris : les « forces du mal » ainsi prises à partie, ce sont toutes les organisations terroristes et leurs complices trafiquants en tout genre, qui tentent de déstabiliser l'Afrique pour mieux faire prospérer leurs affaires louches et leurs trafics juteux.

« C'est pourquoi l'Etat doit se donner pleinement les moyens d'assumer ses missions régaliennes, au premier rang desquelles la paix, la sécurité et la stabilité. Face aux menaces, nos Etats sont tenus de  s'équiper et de se doter de forces armées, suffisemment formées et entraînées », enchaîne le président sénégalais qui en profite pour dénoncer également l'inefficacité de bien des missions des Nations Unies et de forces de maintien de la paix en Afrique. « Il n'est ni normal ni logique » qu'avec 10.000 « casques bleus » de la MINUSMA (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation du Mali), le Mali soit toujours l'objet d'autant d'attaques terroristes, souligne ainsi Macky Sall qui rappelle haut et fort que « l'objectif de ce Forum est de lever les tabous ».

"La cyber-criminalité en passe de devenir

une arme de destruction massive"

Et il en donne aussitôt l'exemple. Car il en va de même – selon lui - en RDC où les 15.000 hommes de la MONUSCO (Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la Stabilisation du Congo) qui a succédé en décembre 2010 à une mission onusienne - déjà présente depuis de longues années - semble faire du sur-place. La MONUSCO, explique pourtant le général français Bernard Commins, son commandant par interim, doit composer avec une situation sécuritaire fragile et une situation politique qui – à l'approche de l'échéance électorale du 23 décembre prochain - « peut encourager certains à agir de manière plus violente ». Dans ce pays, là encore, rien n'est gagné...

Et Macky Sall d'appeler à une « surveillance » plus rigoureuse de l'internet et une « répression de certains de ses usages » parfois inquiétants en Afrique où « la cyber-criminalité est en passe de devenir une arme de destruction massive des sociétés et des valeurs qu'elles portent ». « Des garde-fous s'imposent », ajoute-t-il en saluant l'ouverture – en marge du Forum de Dakar – d'une Ecole nationale de cyber-sécurité à vocation régionale, fruit d'un partenariat franco-sénégalais. Elle a d'ailleurs été inaugurée mardi conjointement par Jean-Yves Le Drian, ministre français des Affaires étrangères, et son homologue sénégalais, Sidiki Kaba, au sein de l'Ecole nationale d'administration. Un sujet qui sera à coup sûr bien évidemment abordé lors du prochain Salon ShieldAfrica, qui se déroulera du 21 au 24 janvier 2019 à Abidjan sur le thème : « Protection et contrôle des frontières ». Tant il est vrai que les cyber-criminels de tous les pays se moquent et se jouent des frontières !

Bruno Fanucchi

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